Ezgjan Alioski brille sous les couleurs de la Macédoine du Nord et de Leeds
Son équipe s’est qualifiée pour l’EURO et a battu l’Allemagne dans les qualifications pour la Coupe du Monde
Il revient sur ces exploits et explique pourquoi son arrivée à Leeds a "changé sa vie"
En 2017, Ezgjan Alioski quitte Lugano pour Leeds, qui s’apprêtait à disputer sa huitième saison consécutive en deuxième division anglaise. Quelques mois plus tard, il achevait son parcours dans l’anonymat du milieu de tableau. Son équipe nationale, la Macédoine du Nord occupait alors une peu reluisante 162ème place au Classement mondial FIFA/Coca-Cola, au terme d’une séquence de 18 matches ponctués de 14 défaites.
Alioski avait alors 25 ans et était encore inconnu au-delà des frontières de la Suisse et de son pays d’origine. Même sur son poste de prédilection suggérit des doutes. Arrière gauche de formation, il s’est reconverti en ailier droit durant son passage à Lugano, avant de se retrouver propulsé à la pointe de l’attaque.
Aujourd'hui, sous l’impulsion de Marcelo Bielsa, Leeds compte parmi les attractions de la Premier League, et la Macédoine du Nord est entrée dans l’histoire en accédant à la phase finale de l’UEFA EURO, avant d’infliger à l’Allemagne sa première défaite dans les qualifications pour la Coupe du Monde de la FIFA™ depuis deux décennies. Durant cette période faste, Alioski est devenu incontournable.
Revenu sur le flanc gauche, il espère se maintenir sur cette trajectoire ascendante. Au micro de FIFA.com, il revient sur les événements de ces derniers mois et sur les personnes qui ont changé sa vie et sa carrière.
Ezgjan, vous avez vécu une année extraordinaire avec la Macédoine du Nord. Quel regard portez-vous sur votre qualification pour l’EURO et cette victoire sur l’Allemagne ?
C’est fou. Le plus important pour nous, en tant qu’équipe et en tant que nation, reste la participation à l'EURO. Ça représente une première étape très importante pour la Macédoine du Nord, qui n’avait jamais été à pareille fête. Nous y avons cru jusqu’au bout. Le groupe avance ensemble depuis maintenant cinq ou six ans. Nous sommes forts, nous savons ce que nous valons. Nous avons du talent et l’équilibre entre les jeunes et les joueurs plus expérimentés est intéressant. L’effectif est stable depuis plusieurs années, ce qui nous a permis d’apprendre à mieux nous connaître. Ensemble, nous avons réalisé notre rêve.
Le but de la victoire dans les barrages pour l’Euro a été inscrit par Goran Pandev. Comment jugez-vous sa carrière et sa personnalité ?
Parfois, je le vois jouer et je me dis : "Ce type a 38 ans. C’est incroyable. S’il avait dix ans de moins, il serait candidat au Ballon d’Or". C’est un joueur extraordinaire. Je ne parle pas uniquement de ses qualités ou de son expérience, c’est aussi quelqu’un de très sympathique. À la façon dont il se comporte avec nous, on ne dirait pas qu’il a gagné la Ligue des champions ou collectionné les exploits tout au long de sa carrière. Il ne se prend pas pour une star et quand on a un problème, on peut toujours aller le voir. Une nouvelle génération va prendre le relais, mais je doute qu’on retrouve un joueur de sa trempe de sitôt. Il a tant donné à notre pays et à notre équipe. Nous l’admirons tous énormément. Après toutes ces années d’efforts, il va enfin participer à un grand tournoi.
L’EURO se profile à l’horizon, mais avez-vous déjà envisagé de disputer un jour une Coupe du Monde ?
Comme tous les enfants passionnés de football, j’ai grandi en rêvant à ces grands tournois. La Coupe du Monde et la Ligue des champions figurent désormais parmi mes objectifs. Maintenant que nous avons battu l’Allemagne, nous savons que nous pouvons y arriver. Pour moi, nous sommes supérieurs à la Roumanie, à l’Islande et aux autres équipes du groupe. Alors, pourquoi ne pourrions-nous pas nous qualifier ? En tout cas, une qualification pour la Coupe du Monde représente la prochaine étape de notre progression.
Votre succès sur le terrain de l’Allemagne a été une grande surprise. Vous attendiez-vous à un tel résultat ?
Oui, sincèrement. Nous sommes arrivés avec beaucoup d’humilité car nous savions que nous avions face à nous une équipe lauréate de quatre Coupes du Monde, dont les joueurs évoluent tous dans de grands clubs. Mais le football a beaucoup changé. Nous aussi, nous avons des joueurs qui évoluent au plus haut niveau. Une équipe comme la nôtre peut créer la surprise, d’autant que nous avions déjà obtenu de bons résultats contre des équipes de premier plan, comme le nul 1-1 face à l’Italie. Nous avions vu que cette équipe avait connu quelques difficultés récemment et nous pensions pouvoir obtenir au moins le nul. Les Allemands ont monopolisé le ballon, mais ils n’ont pas eu beaucoup d’occasions. Tactiquement, nous avons été très bons. Nous avons lutté ensemble et nous avons fait preuve de beaucoup de caractère. Cette victoire est méritée. Cette phrase illustre à elle seule tout le chemin parcouru ces dernières années. Il faut aussi féliciter nos dirigeants, qui ont eu le courage d'investir dans la formation, et notre sélectionneur, qui a toujours cru en nous et qui nous a donné tant de bons conseils.
Comment décririez-vous Igor Angelovski, votre sélectionneur, et Marcelo Bielsa, votre entraîneur en club ?
Leurs personnalités et leurs façons d’envisager le football sont très différentes. Et le métier de sélectionneur ne ressemble pas vraiment à celui d'un entraîneur de club. Et puis, Bielsa est un personnage ! Je ne sais pas si on peut vraiment le comparer à quelqu'un d’autre. Il est unique en son genre (rires). Ils ont tout de même en commun d’être très appliqués dans leur travail. Angelovski croit en ses idées et en ses joueurs. Il fait tout son possible pour entretenir une relation positive avec nous. Il cherche à mettre une bonne ambiance au sein du groupe afin que nous partagions sa confiance. Quand on travaille avec un tel technicien, on se sent à l’aise en entrant sur le terrain. Nous sommes sereins. Les résultats parlent pour lui : nous étions au-delà de la 100ème place du Classement mondial et aujourd’hui, nous occupons le 65ème rang. Il sait ce qu'il fait.
Malgré cette progression, vous serez l’équipe la plus mal classée de cet Euro. La défaite de l’Allemagne va-t-elle inciter vos adversaires à se méfier ?
J’espère que non car ce rôle d’outsiders nous convient à merveille. Nous sommes motivés à l’idée de montrer ce que nous valons vraiment. J’ai toujours dit qu’il y avait beaucoup de talent dans notre région, mais l’argent et les infrastructures nous font défaut par rapport à des pays comme l’Angleterre. Cette qualification doit nous permettre de poser des bases solides pour l’avenir.
Leeds est de retour en Premier League et réussit une bonne saison. Comment vivez-vous cette épopée aux côtés de Bielsa ?
Je dis toujours : Leeds a changé ma vie. Et là, je ne parle pas uniquement de ma carrière. Je suis plus calme aujourd’hui. J’ai plus d’expérience et de maturité, grâce à tout ce que j’ai vécu ici. Après trois années passées aux côtés de Bielsa, je peux dire qu'il a complètement bouleversé ma façon de voir les choses. Qui plus est, j’ai énormément progressé avec lui. Avec un tel entraîneur, j’ai l’impression de m’améliorer chaque jour à l’entraînement. J’ai énormément de chance. Je dois absolument en profiter au maximum car ces trois années ont été fabuleuses, mais elles sont passées très vite. Nous prenons beaucoup de plaisir en Premier League. Maintenant, j'aimerais terminer le plus haut possible car j’ai le sentiment que nous avons construit quelque chose de particulier avec Bielsa.